Augmenter le temps de travail : absurde !

C’est la musique du déconfinement. Le MEDEF, main dans la main avec le gouvernement, demande à augmenter le temps de travail pour favoriser la reprise. Mais c’est sans doute la pire chose à faire.

Une attaque coordonnée contre les droits du travail

Des think-tanks financés essentiellement par le patronat (IFRAP, Institut Montaigne...), au patronat lui-même, en passant par des députés, les voix s’élèvent pour demander ci le passage à 37h, là l’abandon des RTT ou des congés payés ; en somme : il va falloir travailler plus !
Le raisonnement est simple (et même simpliste) : pour rattraper la baisse de production liée au confinement, il suffit de… travailler plus (mais cette fois sans gagner plus) ! Comme la plupart des idées qui tombent sous le sens, celle-ci aussi est dénuée de fondement.

Travailler plus… mais pour vendre à qui ?

Le premier point a trait à l’aveuglement (sans doute conscient) du patronat sur l’état de l’économie. Les ménages ont vu leurs revenus diminuer (soit du fait de l’activité partielle, soit du fait de la perte d’emploi principalement) et on compte déjà 620 000 destructions nettes d’emploi selon l’OFCE. Dans le même temps, une épargne importante (d’au moins 55 milliards d’euros) a été accumulée par les ménages ce qui limite d’autant plus les débouchés des entreprises. Rajoutons l’atonie de l’économie mondiale, et nous avons un tableau d’ensemble de la situation : un déficit de la consommation des ménages et de l’investissement des entreprises qui conduit tout droit à la récession. À quoi bon produire plus en travaillant plus si c’est pour vendre moins ? Il n’y a aucune logique économique à vouloir « mettre les bouchées doubles », pour reprendre les mots de la secrétaire d’État auprès du Ministre de l’Économie et des Finances, quand les perspectives d’activité sont faibles. Même le patronat, s’il n’était pas pétri dans son idéologie, le reconnaitrait sans mal.

Travailler plus… pour accentuer la hausse du chômage ?

Le deuxième point est bien sûr la stupidité de favoriser les heures supplémentaires alors que se profile le spectre du chômage de masse. Nous avons déjà montré qu’en 2018, les heures supplémentaires représentaient au moins 542 000 emplois à temps plein.
Appeler à augmenter les horaires et les cadences, c’est de facto accepter que le chômage augmente. Or le chômage c’est bel et bien le problème central. On ne réalise pas assez que 620 000 chômeurs-euses de plus alors même que 12 millions de salariés ont bénéficié de l’activité partielle est un chiffre très important. Les destructions d’emploi ne peuvent que s’accentuer si aucune politique économique ambitieuse n’est mise en place. Si la relance de la production ne vise pas à favoriser l’emploi, à quoi sert-elle alors ? C’est à cette question que le patronat aurait bien du mal à répondre.

Partager le temps de travail doit faire partie de l’arsenal de sortie de crise

C’est bien la stratégie inverse qu’il faut mener ; au lieu de favoriser la hausse du temps de travail, il faudrait organiser sa répartition. Les avantages économiques de la réduction du temps de travail sont connus : elle contribue à créer directement des emplois (+ 350 000 emplois directs au moment du passage à 35h) ; elle améliore la santé et la productivité des salariés ; elle augmente leurs qualifications. Qu’on soit clair : réduire le temps de travail ne peut se faire sans politique productive globale (ce qui impliquerait une forme de planification) ni sans investissement public massif dans des secteurs clés du point de vue environnemental. C’est la seule manière de diminuer d’éviter l’explosion du chômage. C’est aussi à des lieues des dogmes partagés par le gouvernement et le patronat. La bataille pour la réduction du temps de travail est ancienne, et elle a toujours été l’objet de luttes intenses. Le déconfinement en fera parti.

Réduire le temps de travail, une évolution naturelle

Contrairement aux idées reçues, la réduction du temps de travail est une réalité de longue date : entre 1970 et 2010, la durée réelle du temps travail est en baisse dans tous les pays de l’OCDE. Les gains de productivité et les ruptures technologiques sont à l’origine de cette baisse de la durée réelle du temps de travail. Et cela ne s’arrêtera pas

Historiquement la RTT a été conquise pour permettre aux salariés d’être en meilleure santé et améliorer leur sécurité au travail Ce fut le cas de la journée de 8 heures, de la semaine de 40 heures puis celle des 35 heures hebdomadaires.

La semaine de 32h, c’est possible

Le passage réel à 32 heures est potentiellement source de création de 4 millions d’emplois. Le financement du passage aux 32 heures pourrait être assuré, d’une part, par la réorientation des exonérations de cotisations sociales et des aides publiques, d’autre part, par la dynamique de croissance qu’engendreront les créations d’emplois. Les ressources nouvelles seront apportées par les emplois créés, la résorption des inégalités salariales et de temps de travail entre femmes et hommes, l’amélioration de la santé des travailleurs. Réduire le temps de travail, c’est aussi anticiper les nouvelles ruptures technologiques comme l’arrivée massive du numérique dans nos économies et nos industries.
Il est donc urgent de gagner les 32 heures pour toutes et tous sans perte de salaire

REDUIRE LE TEMPS DE TRAVAIL : INCONTOURNABLE !

Montreuil-sous-Bois, le 19 mai 2020

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