CTPM du 16 décembre : déclaration liminaire de la CGT

On compte à ce jour depuis le début de l’année 2005 plus de 225 000 journées de grève au MINEFI contre 29 000 journées en 2004. Ce chiffre à lui seul vaut plus que tous les sondages et toutes les enquêtes sur la façon d’apprécier ce que pensent les personnels du Ministère des réformes que vous avez décidé, qu’il s’agisse du contenu de ces réformes ou de la manière de les mettre en œuvre.

Passées les habituelles déclarations d’intention lors des prises de fonctions sur la concertation toujours qualifiée à cette occasion de nécessaire voire indispensable, nous avons été rapidement confrontés à des réformes en rafale et à la hache.

Les conditions dans lesquelles les personnels et leurs organisations syndicales ont pris connaissance de la généralisation de la déclaration pré remplie en sont la dernière illustration en date.

Ne comptez pas sur nous pour considérer qu’un message laissé sur un téléphone portable la veille d’une conférence de presse ministérielle sorte le dialogue social du coma profond dans lequel vous l’avez installé.
Sur cette question des relations sociales vous déclarez vouloir parler vrai.

Il nous apparaît que cette notion du parler vrai se concrétise de façon très variable selon les situations et les interlocuteurs.

Au printemps dernier vous avez été de ceux qui faisaient largement savoir votre adhésion au défunt projet de Traité constitutionnel européen bâti autour de la notion – clé de la concurrence libre et non faussée comme vecteur essentiel de progrès.

Nous sommes obligés de constater aujourd’hui, l’actualité aidant, que cette notion clé tant vantée de concurrence libre et non faussée résiste difficilement à l’appétit de profit maximum réalisé sur le dos de millions de cochons de clients.

Toujours à propos du parler vrai à géométrie variable, allez vous aujourd’hui glorifier l’exemple du Royaume Uni qui envisage la mise en place d’une agence des prélèvements obligatoires accompagnée de la suppression de 10 000 emplois de fonctionnaires.

Toujours à propos de parler vrai à géométrie variable, allez vous aujourd’hui nous dire que la retenue à la source est bien un de vos projets majeur remis à plus tard faute de consensus social ?
Toujours et encore à propos du parler vrai, allez vous aujourd’hui dans cette enceinte revendiquer vos droits d’auteur sur l’idée du rachat des jours RTT dans la Fonction Publique ?
Toujours et encore à propos du parler vrai allez vous aujourd’hui nous dire que les personnels du Ministère qui ont depuis le début de l’année 2005 participé aux grèves et manifestations appartiennent à un corps social crispé sur ses avantages ?

Fort occupé par ailleurs, vous n’avez probablement pas relevé ce que l’on pouvait lire sur la banderole de la Fédération des Finances CGT lors de la manifestation du 29 novembre dernier.

On pouvait lire le texte suivant : « Pour un ministère des Finances avec des moyens au service du plein emploi et des besoins sociaux ».
Pensez vous que ce texte est l’expression d’un corps social crispé sur ses avantages voire indifférent aux ravages de la crise sociale ?

Vous affichez et déclamez votre ambition sociale pour le MINEFI.
Allez vous aujourd’hui dans cette enceinte préciser que pour vous cette ambition n’a de sens qu’en accompagnement des réformes ?
Allez vous aujourd’hui dans cette enceinte nous dire que le financement de cette ambition sociale trouve ses limites dans votre volonté d’être intraitable avec la dépense publique et d’agir dans la perspective d’une baisse des budgets en euros constants dans les années à venir ?

On fait volontiers référence au pragmatisme dans les rangs de décideurs ministériels.

Bien que cette référence au pragmatisme soit largement utilisée pour tenter de dissimuler un ralliement inavoué aux thèses ultra libérales, nous nous livrerons à un examen pragmatique de votre ambition sociale.
Financièrement, à ce jour en terme d’abondement de rémunération, cette ambition sociale se concrétise sous la forme d’une prime annuelle aléatoire d’un montant maximum correspondant au prix d’une demi baguette de pain par jour pour chaque agent de notre ministère.
Sommes-nous vraiment ici dans le registre de l’ambition ?

Examinons toujours de façon pragmatique où nous en sommes en terme de concertation et de relations sociales.

Vous aviez déclaré le 22 avril dernier, je cite : « vous demandez que l’on prenne d’avantage de temps pour discuter en amont des réformes avant de les décider. J’y suis par principe favorable ».

Le 7 juillet dernier vous affirmiez, je cite : « je me suis engagé devant vous sur une nouvelle méthode, prendre le temps de l’expertise, vous associer à tous les chantiers de réforme (…) cette méthode j’y suis attaché ».

Peut-on réellement dire que votre méthode a été mise en œuvre à propos de la généralisation de la mise en place de la DPR pour 2006 ?
Où et quand avons-nous discuté en amont de cette réforme ?
Où et quand a-t-on pris le temps de l’expertise ?

En matière d’expertise prenons un autre dossier, celui de la réforme de la notation.

Audit vous avez décidé, audit a donc eu lieu avec publication d’un rapport formulant des préconisations.

Un premier groupe de travail s’est réuni le 7 décembre pour examen des suites à donner aux préconisations du rapport d’audit.
Il ressort clairement de cette réunion la volonté de ne pas mettre en œuvre les préconisations les plus significatives.
Faut-il en conclure qu’un audit ne vaut que lorsque ses conclusions sont totalement conformes aux attentes du commanditaire ?
Nous l’avons dit lors de cette réunion et nous le répétons devant vous : il est pour nous hors de question que la campagne de notation de l’année 2006 se déroule sur base des textes actuellement en vigueur.
Si cela était le cas, il est de notre responsabilité d’attirer votre attention sur le fait que vous vous trouviez confronté à des réactions très très vives des personnels pouvant mettre en cause l’issue de la campagne de notation.

Toujours sur l’organisation des relations sociales et l’évolution des instances de concertation au regard notamment de la mise en œuvre de la LOLF.

Force est de constater que sur ce sujet votre ambition sociale consiste à décider d’en rester à l’existant.

Ne rien changer, cela relève-t-il du registre de l’ambition ?

On sait la forte propension à aller voir ailleurs pour y repérer les bonnes pratiques éventuellement transposables dans notre pays en matière de gestion publique.
Les rapports, colloques, articles de presse sont innombrables mais d’une grande constance dans leur contenu.
On y vante les bienfaits d’une gestion inspirée des principes anglo saxons : performance, abandon du statut d’emploi public, réduction d’effectifs, privatisation, rémunération au mérite.
De nombreux pays ont mis en œuvre des réformes inspirées de ces principes depuis maintenant plusieurs années.
Ces réformes sont maintenant à l’épreuve du temps et de l’expérience.
Les premiers bilans tirés dans divers colloques européens sont catastrophiques à tout point de vue.

On s’en tiendra ici au constat que la satisfaction du public est inversement proportionnelle à la performance réalisée et affichée dans les administrations locales au Royaume Uni et que le résultat obtenu en rapport aux objectifs a des conséquences néfastes sur la manière dont les ressources sont utilisées ou sur la qualité du service fourni.
Nos adeptes du benchmarking iront-ils vérifier ces mauvaises pratiques pour éviter de les transposer dans notre pays ?

Nous avons la faiblesse d’en douter car il s’agissait moins de procéder à une véritable analyse comparative que de vanter les mérites d’une démarche relevant pour l’essentiel de choix politiques.
Nous sommes moins avancés dans les réformes de la gestion publique que bon nombre d’autres pays de l’OCDE.

Cela nous laisse le temps d’éviter de réitérer des erreurs faites ailleurs.
Aurez vous l’ambition de mettre ce délai à profit pour vous extraire d’une approche dogmatique ?

Ou allez vous continuer à réformer en refusant de voir la réalité ?
Les participants aux colloques précités s’interrogeant sur les valeurs du service public en lien avec les réformes de la gestion publique se sont posé la question suivante :
« Sommes nous ici confrontés à l’un des effets pervers de la nouvelle gestion publique ? Assiste-t-on à l’effacement progressif de l’intérêt général derrière des objectifs managériaux et financiers (…) ?
Il semble que la réponse soit positive ».

Serez vous attentif à cette interpellation ?

Les revendications portées par la Fédération des Finances CGT et l’ensemble de organisations syndicales du Ministère vous ont été transmises et ont été développées devant Mr le Secrétaire général.
Nous attendons vos réponses.

Nous insisterons cependant sur trois sujets à propos desquels une réponse favorable de votre part permettrait de vérifier la réalité d’une ambition sociale.

Etes-vous, oui ou non, prêt à attribuer les moyens budgétaires et en effectifs qualifiés indispensables au bon fonctionnement des services et nécessaires à la bonne exécution des missions ?

Etes-vous, oui ou non, prêt à donner à votre collègue de la Fonction Publique les moyens d’une véritable négociation notamment sur l’évolution de la valeur du point d’indice qui ne saurait être inférieur à l’inflation pour 2006 ?

Etes-vous, oui ou non, prêt à ce que le MINEFI prenne toute sa place dans la construction d’un dispositif pour le développement et la sécurisation juridique d’une protection sociale complémentaire de qualité. Comme vous le demandent les organisations syndicales et les mutuelles de ce Ministère ?

Rappelons pour terminer qu’il n’y a pas « les » réformes, mais « des » réformes, celles que vous mettez en œuvre et que nous apprécions comme régressives, celles qu’il serait nécessaire d’engager, des réformes progressistes permettant au Ministère d’être réellement au service du plein emploi et de la satisfaction des besoins sociaux.

Nous allons vous écouter très attentivement et nous rendrons compte très rapidement aux personnels du Ministère en intégrant notre appréciation et notre analyse.

Il est en effet de notre responsabilité de nourrir le débat public constitutif de la démocratie sociale.

Nous contacter

Fédération des Finances CGT
263 rue de Paris - Case 540
93514 Montreuil cedex
Tel : 01 55 82 76 66
contact@cgtfinances.fr
https://www.high-endrolex.com/11