CTPM du 18 décembre 2007 : Déclaration commune des Fédérations CGT de l’Equipement – Environnement et des Finances

Monsieur le ministre d’Etat,

Vous avez convoqué ce jour un Comité technique paritaire ministériel (CTPM) afin de nous présenter la future organisation du ministère de l’écologie, du développement et de l’aménagement durables (MEDAD).

Avant d’aborder ce point de l’ordre du jour permettez-moi d’apporter un commentaire plus général concernant l’intervention du Président de la République le 12 décembre dernier sur la révision générale des politiques publiques (RGPP).

L’objectif affiché serait de mieux répondre aux intérêts des usagers, des contribuables et des fonctionnaires. Sauf que la réalité est tout autre.

En effet, bien avant que les mesures ne soient définies, un rapport parlementaire dévoile l’objectif réel qui est de réduire massivement le budget de l’Etat. Le chiffre de 14 milliards d’euros est avancé en première étape ! Lors de notre rencontre du 18 juillet dernier, nous vous avions dit que pour la CGT aucune réforme ne pouvait avoir lieu ayant pour seul objectif la réduction budgétaire et la diminution des emplois publics. L’emploi public existe au regard de missions publiques pour - assurer et garantir les droits reconnus au citoyen et participe de l’intérêt général.

Les mesures annoncées le 12 décembre dernier par le Président de la République iraient selon lui vers un meilleur service public pour l’usager. Permettez-nous d’en douter ! Ce qui est proposé se traduit, après la loi dite de décentralisation d’août 2004, par un nouveau désengagement de l’Etat et la fermeture d’un grand nombre de services de proximité.

Alors une meilleure réponse aux intérêts du contribuable ?
Le contribuable est aussi un citoyen pour lequel les impôts doivent permettre de financer les services d’intérêt général. Avec le programme gouvernemental, celui-ci aura moins de services publics à sa disposition. La privatisation des services se traduirait de surcroît par des coûts plus élevés ainsi que le démontrent l’exemple de l’eau gérée par les sociétés privées. Quant au bradage de la fonction publique, l’exemple Anglais où le gouvernement est obligé de commencer à faire marche arrière, mérite d’être médité.

Une amélioration de la situation des agents de la fonction publique ?

Quand un agent d’exploitation spécialisé de catégorie C au 9ème échelon perçoit une rémunération nette de 1319 euros, primes comprises, par mois après 25 ans d’ancienneté ; il est temps, Monsieur le Ministre que, contrairement à ce qu’il s’est passé hier soir, de véritables négociations s’ouvrent sur la revalorisation du point d’indice, mais également sur une réelle reconnaissance des qualifications devant se traduire par une refonte de la grille sur la base de 1500 € brut minimum.
Le gouvernement prépare un plan de suppression d’emploi d’une ampleur inédite, des chiffres de l’ordre de 200 000 emplois supprimés sont cités. Si ces suppressions ne pourront avoir qu’un effet marginal sur la résorption du déficit annuel (moins de 5%), elles préparent à l’évidence de nouvelles privatisations.
Sur le plan statutaire, le discours du Président de la République du 19 septembre dernier à l’IRA de Nantes indique clairement la voie poursuivie : il s’agit de s’attaquer au statut des fonctionnaires lui-même en proposant le choix aux nouveaux entrants entre contrat de droit privé et le statut de la fonction publique. Les corps devraient laisser la place à une gestion des emplois et des métiers avec des carrières et des rémunérations individualisées. Même la garantie de l’emploi est visée, ainsi il est proposé de négocier les départs avec un pécule !

Attaque du statut, moins de services publics, moins de droits pour les citoyens, c’est un vaste plan de régression sociale que la CGT entend combattre.

C’est dans ce contexte que s’inscrit le nouveau projet de réorganisation de l’Administration centrale. Projet élaboré en dehors de toute information des personnels et de leurs représentants, sans même parler de concertation.
Situation qui n’est certes pas une première, à ceci près qu’un pas nouveau vient d’être franchi dans l’autoritarisme et le mépris des personnels…
Madame la Directrice Générale du Personnel et de l’Administration, vous nous parlez de dialogue social mais - c’est une première - vous ne respectez pas les textes réglementaires en refusant de convoquer, comme vous le demandait l’ensemble des représentants des personnels, le CTPC qui vous est rattaché.
Monsieur le Ministre, vous préférez vous adjoindre des cabinets d’audits privés plutôt qu’associer l’encadrement de ce ministère à l’élaboration de cette réforme ; encadrement qui sera précisément chargé de sa mise en œuvre et rémunéré en fonction des résultats.

Aujourd’hui le message général que vous entendez faire passer est le suivant : « les personnels n’auraient pas à s’inquiéter » : ainsi les agents devraient être intégrés par « blocs », les sous-directions et services préservés de découpage… Déjà le schéma proposé contredit ses assertions.
La réorganisation, nous dit-on, devrait s’effectuer à « moyens constants ». Qui peut le croire alors que l’administration centrale paiera son tribut dans le cadre des suppressions massives d’ETP en 2008 et qu’il nous est annoncé un non-renouvellement de 1 agent sur 2 dès 2009 !
La suppression d’effectifs et de moyens est au cœur même de cette réorganisation. Des administrations centrales « réduites », « allégées » comme l’écrit M. Woerth : les personnels savent lire !

Nombreux sont les agents de toutes catégories à s’interroger sur la pertinence de la réorganisation prévue et à faire part de leurs inquiétudes. Si la nécessité d’une réflexion transversale est évidente afin d’agir pour un aménagement durable du territoire, celle-ci doit ne doit pas entraîner une centralisation extrême des moyens supports, la spécificité des compétences existantes doit être conservée pour une efficacité au plus près des missions.
Ces besoins de compétences de proximité dans les directions pour les fonctions européenne, internationale, juridique ou de communication s’avèrent incompatibles avec des ponctions qui s’opéreraient dans des unités aux effectifs déjà réduits. Les économies qui pourraient être réalisées sur des fonctions supports ne seraient que de fausses économies. Il y aurait beaucoup de pertes de moyens, de connaissances, d’efficacité, beaucoup d’efforts à faire pour reconstruire des coopérations, éviter de nouveaux cloisonnements.

Le regroupement de 35 directions d’administration centrale en 5 directions générales et un secrétariat général peut sembler de bon sens si ce n’est qu’il est d’abord guidé par des objectifs comptables et présente de plus des incohérences.

 Par exemple, en rattachant la pollution atmosphérique à la direction générale Energie et Climat que resterait-il d’une approche intégrée partant des rejets des industries pour prévenir les transferts vers tous les milieux air – eau – sols ?
 Le maintien d’une délégation interministérielle à l’aménagement et à la compétitivité des territoires, qui à l’heure actuelle prépare, impulse et coordonne les politiques d’aménagement du territoire menées par l’Etat. Comme va-t-elle s’articuler avec le Secrétariat général et le Commissariat général au développement durable ?
 Ou bien encore, comment garantir que les contradictions entre les intérêts économiques de court terme et ceux des citoyens et de l’environnement seront bien arbitrés au fil des décisions si celles ci relèvent du même chef de service ou directeur ?
 L’actuelle Direction générale de l’énergie et des matières premières sera-t-elle totalement intégrée dans la Direction générale de l’énergie et du climat ?
 La création d’une direction des transports intermodaux ne garantit pas une véritable approche multimodale favorable au fer et à la voie d’eau et les récentes décisions en matière de fret ferroviaire nous confortent dans ces craintes.
 L’éclatement de la sous-direction déchets et produits chimiques pose difficulté.
 Quant à la création d’un Commissariat au Développement Durable, celle-ci ne laisse pas d’interroger. Il est difficile de croire que ce dernier ne gèrerait que le moyen et le long terme lorsque c’est chaque semaine que le ministre présidera son comité stratégique.

C’est bien une centralisation et une politisation accrues de l’administration centrale qui est en perspective avec tous les risques que cela comporte.
Le service de communication du ministère ne doit pas devenir le service de propagande du ministre.

Quant à la statistique, celle-ci doit rester indépendante du politique.

Sur un autre plan, l’effacement du conseil général des ponts et chaussée illustre à sa façon le grand bradage de la technicité de notre administration.

Qui plus est, la réorganisation qui nous est présentée pourrait être la première phase d’un démembrement de l’administration centrale au travers de l’externalisation de missions et de transformations de services dans des structures de type agences avec mise en cause des statuts des personnels. C’est un risque immédiat dans le cadre de l’implosion de la DSCR en 4 morceaux dont la constitution d’une agence pour les examens du permis de conduire, agence qui s’autofinancerait sur le paiement de droits d’examen pouvant s’élever jusqu’à 150 € voire plus !

La CGT ne laissera pas faire. Nous serons au côté des agents pour préserver les contenus professionnels, les capacités d’expertises et les potentiels encore présents dans les services. Sur la méthode, nous demandons que les personnels soient enfin consultés et entendus sur l’évolution de leur service et de leurs moyens.
Nous continuons d’exiger la convocation des CTPC, instances la plus appropriées pour une discussion approfondie sur une réorganisation concernant l’ensemble de l’administration centrale du MEDAD et ses personnels dont il convient de respecter les droits : droit à un poste correspondant à sa qualification, droit à la mobilité choisie et à la formation, transparence dans l’attribution des postes, recouvrement de postes pour assurer la transmission des connaissances...
La préservation des missions et des emplois implique quant à elle le gel des suppressions d’emplois et amputation de crédits.

Concernant le devenir des locaux du 20 avenue de Ségur qui a fait l’objet d’un vœu adopté par le CTPM de l’écologie fin avril, les personnels attendent des réponses à leur demande.

Dans le périmètre de compétence du ministère, les transports doivent s’inscrire dans une approche multimodale, cohérente et efficace du développement durable ; l’ambition suppose un retour à une maitrise publique tant il est vrai que le système de transport répond de l’intérêt général et nécessite un secteur public fort. La CGT vous prend au mot quant à l’objectif d’une maitrise publique pour aller vers une réorientation de la politique des transports en vue de mettre en place une alternative aux choix libéraux peu compatibles avec les travaux du Grenelle de l’environnement. La CGT récuse la logique de compétitivité économique et de concurrence entre les modes ainsi que la logique d’intervention des partenariats public-privé qui répond avant tout aux intérêts financiers et accompagne le désengagement de l’Etat.
D’autre part, nous vous informons qu’il existe des services navigations dans notre ministère, qu’ils représentent une alternative au tout routier. Or, ils sont absents du Grenelle. Ce que nous regrettons fortement.

La préoccupation de fond sur le périmètre du MEDAD : cohérence, transversalité et solidarité des territoires fonde notre conception et justifie une nouvelle gouvernance des affaires de ce ministère et une volonté de démocratie dans les choix politiques. Comme l’exige les questions communes du secteur mer, maritime et portuaire, nous revendiquons un CTP Mer comme lieu de concertation de l’ensemble des agents concernés dans ce périmètre. En revanche, la formulation sibylline concernant le positionnement de l’ENIM suscite beaucoup d’interrogation chez les personnels et appelle des éclaircissements.

La CGT a pour conception de porter des logiques intégrées et multimodales de maitrise publique des infrastructures et de leur utilisation en cohérence avec l’habitat, l’urbanisme et le logement et de la nécessaire régulation par des outils publics.

Concernant l’organisation au niveau territorial.
Dans le cadre de l’organisation locale de l’Etat, il a été annoncé la création de directions régionales de l’écologie, du développement et de l’aménagement durables par regroupement des actuelles directions régionales de l’équipement (DRE), des directions régionales de l’environnement (DIREN) et des directions régionales de l’industrie, de la recherche et de l’environnement (DRIRE) pour la partie qui relève des missions du MEDAD et au niveau départemental par la fusion des DDE et DDAF. Sous couvert de donner au niveau régional de nouvelles prérogatives dans la mise en œuvre de politiques publiques, on assiste à un effacement progressif du niveau départemental. Le préfet de région aura désormais autorité hiérarchique sur le préfet de département. Partant du constat dogmatique des réductions des dépenses publiques, il y aurait pléthore de services. Qui plus est, la fusion DDE-DDAF n’offre aucune garantie quant au maintien de ces directions fusionnées dans le périmètre du ministère puisque la RGPP précise, je cite : « au niveau départemental à l’issue de la réforme les agents des services travailleront dans des directions départementales qui ne seront plus directement rattachées à telle ou telle administration centrale ». Comment croire vos propos dans un tel contexte ?

Sur la fusion des DRE-DRIRE-DIREN, les personnels concernés s’interrogent quant à leur devenir tant en terme de mission que de déroulement de carrière et de gestion.
Le rapport du préfet ARIBAUD pointe la question de l’harmonisation des rémunérations et des régimes indemnitaires. Les personnels des DRIRE seront-ils intégrés et gérés par le MEDAD ou bien mis à disposition ? Nous exigeons que les personnels et leurs représentants soient pour le moins informés et consultés sur les points que nous venons de citer.

Plus globalement, la CGT vous a maintes fois exprimé sa revendication de donner les moyens pour mettre en œuvre et contrôler le respect des règles fixés par les choix politiques. Cela suppose de concevoir une organisation des hommes et des femmes et des moyens en conséquence ainsi que des engagements financiers à la hauteur des enjeux, y compris au regard des besoins exprimés à l’occasion du Grenelle de l’environnement. D’ailleurs, le Sénat déplore l’absence de traduction financière et budgétaire des mesures du Grenelle dans la loi de finances 2008 ! Au niveau confédéral Bernard Thibault vous a également saisi sur ce sujet.

Sur cet aspect, nous voulons ici dénoncer l’absence totale de concertation avec les représentants du personnel. En effet, aucune réunion de présentation du PLF 2008 n’a été faite en CTPM alors que nous vous l’avions demandé. Cela traduit une volonté de passage en force.

Par ailleurs, comme il est indiqué dans la fiche RGPP sur la simplification des procédures internes à l’Etat, une des conclusions du rapport annonce la création à tout va d’agences de service public. Pour ce qui nous concerne, et comme nous l’avons déjà exprimé, la CGT récuse dans son principe cette évolution dans la mise en œuvre des politiques publiques et donc nous nous opposons à toute nouvelle expérimentation qui s’apparenterait à une volonté d’externalisation ou de démantèlement des services et de mise en cause du statut des agents.

Les mêmes enjeux de service public traverseront la poursuite des travaux du Conseil de modernisation des politiques publiques d’avril 2008 puisqu’ils porteront notamment sur le permis de construire, la mission d’ingénierie concurrentielle, la politique de l’eau et le pilotage des opérateurs.

En ce qui concerne les établissements publics, nous dénonçons la suppression prévue d’implantations comme à Météo-France et leur pilotage de plus en plus par la rentabilité. Quant à ceux de l’ex champ de l’écologie ils n’auront pas les moyens d’assurer leurs missions que ce soit l’ONEMA où les personnels se sont largement mobilisées, à l’ONCFS où des recrutements sont indispensables pour répondre au déficit d’effectifs tout comme dans les Parcs nationaux. Dans tous ces services ainsi que dans les Agences de l’eau des chantiers doivent être menés à bien concernant la situation des personnels et les missions. Quant aux personnels des réserves naturelles de France, ils dépendent de nos subventions.

L’ensemble des réorganisations, ne doit pas conduire à des mobilités forcées pour les personnels. Pas plus qu’elle ne doit conduire à une remise en cause de l’action sociale dont les structures au contraire doivent être pérennisées. Pour cela, le ministère doit maintenir voire consolider l’arrêté du 22 mai 1985 et la circulaire du 26 juin 2000, précisant le rôle du Comité central d’action sociale et des Comités locaux d’action sociale. Dans cette période extrêmement tendue, l’action sociale de proximité indispensable aux agents, ne pourra continuer à se développer que dans le respect des textes en vigueur permettant aux Présidents de CLAS d’exercer sereinement leur mandat. Nous demandons également l’activation rapide du Groupe de travail « Action Sociale ».

La CGT se prononce pour que le ministère de l’écologie, du développement et de l’aménagement durables soit porteur d’une stratégie globale s’agissant tant de l’industrie, que de l’environnement, des transports, de l’équipement et d’aménagement du territoire.

Il faut donc que le MEDAD soit aussi un grand ministère technique qui permette des interventions cohérentes, coordonnées et organisées au niveau national, régional et départemental avec un réseau territorial au plus près des usagers qui, d’ailleurs, est revendiqué par les élus et les citoyens. Nous considérons que les services déconcentrés sont les lieux privilégiés pour développer l’ensemble des missions. En tout état de cause, une organisation territoriale de l’Etat qui serait construite uniquement sur la base du ministère de l’intérieur et des préfectures ne pourrait pas répondre aux enjeux qui sont posés à notre pays.

La CGT est pour défendre et rénover la fonction publique :

 en préservant au niveau national des outils d’intervention, de mise en cohérence des politiques publiques, de régulation et de contrôle,
 en maintenant et développant des services publics de proximité de qualité, accessibles à tous permettant un accueil amélioré des usagers et un traitement optimal de leurs demandes, dans le respect des missions et des qualifications des agents ; cela suppose également une réelle revalorisation de leur rémunération, des statuts attractifs et rénovés,
 avec des coopérations étroites entre les services de l’Etat et ceux des Collectivités territoriales pour répondre aux besoins qui s’expriment dans le souci de l’égalité de traitement,
 en assurant une réelle démocratisation des services avec des droits nouveaux pour les usagers et les personnels.

Tout cela appelle un vaste débat public qui, jusqu’à maintenant, a fait singulièrement défaut.

Enfin, monsieur le ministre, vous avez la responsabilité des personnels de ce ministère.
Une grande partie des personnels du secteur Exploitation vont être transférés aux collectivités territoriales, sans plus de garanties statutaires.

La fédération C.G.T. de l’Equipement réclame la création d’une filière spécifique Entretien/Travaux/Exploitation des Infrastructures, RBA, VN, PM dans la fonction publique territoriale et vous demande qu’une réunion soit organisée entre le MEDAD, le ministère de l’intérieur et notre organisation syndicale.

Merci pour votre attention.

CTPM Présidé par le ministre d’Etat Jean-Louis Borloo et en présence de la Secrétaire d’Etat à l’écologie N. Kosciusko-Morizet et du Secrétaire d’Etat aux transports D. Busserau.

Nous contacter

Fédération des Finances CGT
263 rue de Paris - Case 540
93514 Montreuil cedex
Tel : 01 55 82 76 66
contact@cgtfinances.fr
https://www.high-endrolex.com/11