CTPM du 29 septembre : déclaration liminaire de la CGT

Monsieur le président,

Les responsables du ministère évoquent très souvent leur attachement à la qualité du dialogue social. Il s’agit hélas le plus souvent de déclarations incantatoires. Pour notre fédération, la qualité des relations sociales ne se mesure pas au nombre des réunions organisées au hasard d’un calendrier changeant. Elle devrait surtout se caractériser par votre qualité d’écoute des agents et de leurs organisations syndicales, par la prise en compte des aspirations des uns et des propositions des autres. De ce point de vue il y a échec, et la politique du fait accompli est plus que jamais de rigueur : ce n’est pas le CTPM du 7 juillet que présidait Mr. Breton qui pourra infirmer ce constat.

Ce n’est pas non plus le vote favorable des représentants du MINEFI aux 40 suppressions d’emplois lors du CA de l’UGAP qui pourra infirmer ce constat.

Monsieur le président,

La réunion de ce jour, consacrée à l’examen d’un projet de loi de Finances concocté dans le cadre de la LOLF se tient dans un contexte politique et économique que nous n’hésiterons pas à qualifier de détestable.

La modernité de ce gouvernement consiste à renouer avec les vieilles traditions de la bourgeoisie du 19ème siècle utilisant l’armée pour réprimer les luttes sociales.

Hier on envoyait la cavalerie charger les mineurs sabre au clair, aujourd’hui on envoie les hélicoptères des commandos de la Marine.
Les mesures et les orientations prises par le gouvernement de Mr De Villepin tournent le dos aux exigences sociales, exprimées avec force par la population lors des multiples mouvements sociaux et lors de toutes les dernières consultations électorales nationales.

Ce gouvernement et sa majorité parlementaire ont fait le choix d’accentuer une politique de démolition et de régression sociale qui n’épargne aucun aspect de la vie des habitants de ce pays. A ce titre, vous nous permettrez de citer :
La tentative de casse du code du travail, avec notamment la création du Contrat Nouvelle Embauche, qui instaure une période d’essai de 2 ans pendant laquelle les employeurs pourront licencier sans motif et sans prévis.

Pour la CGT, il n’y aura pas de nouvelles embauches dans le pays, il n’y aura que des nouveaux précaires, puisque cette mesure obéit à un souhait de MEDEF qui depuis longtemps rêvait que l’on s’attaque enfin aux contrats à durée indéterminée.

Naturellement, cette attaque contre le droit des salaires devait être accompagnée d’une attaque contre leur droit de représentation. C’est maintenant chose engagée, avec les nouvelles modalités de décompte de salaires de moins de 26 ans dans les entreprises.

Nous souhaitons également condamner cette politique d’intimidation et de régression à l’encontre des chômeurs et des immigrés, qui tend à faire admettre par la force s’il le faut, que les chômeurs seraient à l’origine du chômage et les pauvres responsables de leurs malheurs.

Enfin, et cela est tout à fait cohérent avec cette vision ultra-libérale de l’évolution de notre société, nous constatons la casse de tout un ensemble d’outils pourtant indispensables au lien et à la cohésion sociale. Nous parlons ici du bradage d’une partie du réseau de lignes SNCF et de la privatisation d’EDF à l’heure où tout commande de maîtriser les sources d’énergie et sa distribution.

Mais nous parlons également des dangers concernant le financement du logement social avec cette nouvelle baisse du taux du livret A. Et que dire des mises en cause continues de notre système de protection sociale avec l’augmentation elle-même continue des exonérations accordées aux entreprises dont la totale inefficacité se démontre dans le taux de chômage que nous connaissons.

Vous comprendrez, monsieur le président, que nous nous arrêtions quelques instants sur la réforme fiscale qui pourrait voir le jour en 2007, manifestement année de tous les dangers.

Cette annonce est politiquement électoraliste, socialement injuste, économiquement absurde. Par définition, il n’y aura baisse de l’impôt sur le revenu que pour ceux qui en paient, c’est-à-dire aujourd’hui moins d’un foyer fiscal sur deux. Les autres n’en bénéficieront donc pas mais devront en revanche supporter le coût de cet allègement, notamment par une dégradation de la qualité de certains services publics.

L’argument utilisé, selon lequel l’augmentation et la mensualisation de la prime pour l’emploi est un plus pour cette catégorie de population, est fallacieux. Car si nous comprenons que cette mesure intéresse les salariés qui en bénéficieront, elle aura surtout pour conséquences de favoriser le temps partiel, d’instaurer de fait un paiement partiel par l’Etat des salaires concernés, d’entériner un nouveau désengagement des entreprises.

Cette réforme profitera surtout aux revenus les plus élevés, car l’intégration de l’abattement de 20% dans la base de calcul n’apportera aucun avantage aux salariés mais profitera aux autres catégories de revenus. Il faut naturellement ajouter à cela la baisse du nombre de tranches qui réduira fortement la progressivité de l’IR et la plafonnement de l’ensemble des impositions à 60% du revenu qui conduit à la réduction de l’ISF. Une remise en cause de l’autonomie financière des collectivités locales.

La volonté affichée est une baisse simultanée du déficit budgétaire et du niveau de prélèvements. Les choix opérés conduiront nécessairement à la baisse des dépenses publiques. Or celles-ci sont indispensables notamment pour défendre et renforcer le potentiel productif du pays.
Pour la CGT il y a effectivement nécessité de revoir notre système fiscal. Mais l’enjeu essentiel porte sur le poids des impôts indirects, notamment la TVA, trop élevé par rapport aux impôts directs.

Le débat que nous souhaitons, pour aboutir à des évolutions acceptées par tous, ne peut reposer que sur les principes suivants : égalité de traitement, efficacité et justice économique et sociale. Pour ce faire, c’est-à-dire assurer la pertinence et la cohérence de l’intérêt général sur l’ensemble du territoire, la Fonction Publique d’Etat est une nécessité et non le poids mort et coûteux que certains croient pouvoir dénoncer en lançant en pâture quelques chiffres sans signification réelle dans un intolérable registre populiste.

Sur ce dernier point, nous ne pouvons d’ailleurs résister au plaisir de vous faire part de ces quelques chiffres qu’un grand quotidien du soir vient de rappeler.

  1. L’Etat dépenserait toujours plus. NON. La part des dépenses de l’Etat rapportée ai PIB atteignait 22,1% du PIB en 1978, est resté stable pendant les 25 années suivantes pour se situer à 22,8% en 2003. Soit une progression de 0,7 point en ¼ de siècle.
  2. L’Etat prélèverait toujours plus : NON. La part des prélèvements de l’Etat a chuté de 18,4% di PIB en 1970 à 15,6% en 2003, soit l’équivalent de 43 milliards d’€, ce qui est à peu de chose près, le montant du déficit budgétaire !

Monsieur le président,

Nous ne pouvons pas ne pas évoquer la question lancinante du pouvoir d’achat. L’envolée du prix du pétrole n’explique pas tout. En effet la valeur du point d’indice a pris un retard de plus de 5% depuis le 1er janvier 2000 en regard de l’augmentation des prix.

Il existe donc une exigence forte quant à l’ouverture de véritables négociations salariales. La réponse ne pourra être sans cesse différée et de plus si nous ne sommes pas d’emblée opposés au fait qu’en matière de pouvoir d’achat, d’autres éléments puissent être pris en considération, comme les transports par exemple, il ne saurait être question pour la CGT d’accepter un troc qui se solderait par un décrochage continu de la valeur du point d’indice en échange d’une prise en charge améliorée de certaines contraintes.

Nous restons profondément attachés à des augmentations générales des traitements et pensions, parce que cela est juste et efficace.
C’est pourquoi, monsieur le président, nous tenons à rappeler à quel point nous sommes opposés à toutes formes déclarées ou implicites d’individualisation des rémunérations quelles qu’en soient les raisons évoquées et les formes d’attribution.

Que cela s’appelle « prime collective à la performance » ou autrement aujourd’hui, outre le fait que notre fédération n’a jamais revendiqué de prime, nous rejetons totalement ce genre de mécanisme qui nous paraît être un nouvel avatar d’un choix idéologique, mécanisme au demeurant totalement inopérant en matière de mobilisation professionnelle si l’on en croit les DRH réunis en colloque par l’IGPDE.

Quelques observations sur les moyens budgétaires accordés au MINEFI dans le cadre du projet de loi de Finances 2006.

Si l’on comprend bien les éléments chiffrés parvenus hier, les moyens affectés au MINEFI dans le PLF 2006 soient en très forte régression par rapport à l’année 2005.

S’agissant des emplois, nous nous en tiendrons à la rubrique « suppressions d’emplois » définie par vous-même comme indiquant le niveau – je cite – de « suppressions d’emplois du PLF 2006 impactant réellement les services, c’est-à-dire se traduisant par une diminution des emplois effectivement implantés dans les directions ».

Selon cette référence nous aurons donc globalement 2465 suppressions d’emplois au MINEFI soit moitié du total des suppressions d’emplois dans l’ensemble de la Fonction Publique d’Etat.

Une fois de plus notre ministère est la cible principale et ce n’est pas une médaille qui permettrait d’apprendre à dire merci qu’on fera passer cette amère potion.

Sur les 2465 emplois supprimés on relève 1150 suppressions à la DGI, 800 à la DGCP, 140 en Centrale, 190 à la Douane, 13 à la DGCCRF.
Au-delà du discours idéologique sur les gains de productivité dans la Fonction Publique d’Etat et des taux avancés sur la base de comparaisons internationales aux fondements scientifiques très improbables, nous répétons ici que les suppressions d’emplois annoncées ne reposent sur aucune étude sérieuse.

Ces nouvelles suppressions vont donc mécaniquement générer notamment des abandons de missions, une détérioration des conditions de travail des personnels, un recul de la qualité de l’accueil des publics.
Il existe d’autres raisons aux inquiétudes des agents. La plus récente et sans doute pas la moins grave concerne la protection sociale complémentaire. Un document daté du 20 juillet 2005, adressé par la commissaire européenne à la concurrence somme la France de donner son accord, et avant le 1er octobre 2005, à l’interdiction de toute aide publique au mouvement mutualiste dans la FP au nom du principe d’une concurrence libre et non faussée. Ce, pour une application au 1.01.2006.

Très concrètement, cela signifie que le mouvement mutualiste serait privé de toute aide publique et que donc l’équilibre financier actuel, déjà fortement menacé du fait des reculs constants du régime général, serait impossible à tenir sauf forte hausse des cotisations.

L’arrêt du Conseil d’Etat du 26 septembre abrogeant l’arrêté du 19.09.1962 confirme la gravité de la situation.

Il s’agit pour nous d’une véritable agression à l’encontre d’un système qui sans être parfait a fait les preuves de son efficacité sociale. Le but est évidemment d’ouvrir la porte à des opérateurs privés avec les conséquences que nous connaissons, c’est-à-dire la casse du principe de solidarité intergénérationnelle et inter - catégorielle. C’est le retour programmé à la logique de la jungle sur fond de profit maximum pour quelques sociétés d’assurances.

La Commission européenne ose affirmer que le soutien de l’Etat aux Mutuelles de la Fonction Publique n’est plus compatible avec l’évolution du marché commun.

Nous répondrons qu’il y a eu un certain 29 mai dans le pays et que les citoyens français ont adressé notamment le message suivant : l’évolution du marché commun n’est pas compatible avec le maintien d’un soutien public à l’ensemble du système de protection sociale.

Notre fédération considère que le gouvernement français doit refuser cet oukaze et qu’en tout état de cause il y a lieu d’épuiser tous les recours possibles.

En second lieu, au delà des textes juridiques, il y a surtout la réalité en l’absence de volonté politique. La CGT n’acceptera pas que la sommation de la commission européenne serve de paravent au gouvernement pour mettre fin au dispositif actuel fondé sur une solidarité collective.
Nous mettrons tout en œuvre dans l’unité la plus large du mouvement syndical et mutualiste, pour préserver et améliorer dans le cadre du renforcement du régime général le régime de protection sociale complémentaire.

En quelques grands traits, à quoi sommes nous confrontés aujourd’hui :

  • A une politique générale de casse des droits sociaux. (IRGANTEC, régime particulier de retraite de la Banque de France).
  • A une adaptation de la législation fiscale au profit essentiellement des plus riches générant à terme un affaiblissement des moyens budgétaires pour mener des politiques publiques.
  • A une tactique piteuse de retardement s’agissant de la question salariale dans la Fonction Publique.
  • A la régression amplifiée pour 2006 des moyens affectés au MINEFI avec notamment 2465 suppressions d’emplois.
  • A une absence de volonté politique face aux menaces sur notre système de protection sociale complémentaire.

Autant de raisons pour lesquelles les personnels du MINEFI seront en grève et manifesteront le 4 octobre avec leurs collègues de la Fonction Publique mais aussi avec l’ensemble des salariés de notre pays.
Autant de raisons pour lesquelles au-delà du 4 octobre les personnels du MINEFI continueront à agir.

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