Loi travail XXL #8 : les saisonniers

Les travailleurs relevant d’un contrat saisonnier travaillent dans une multitude de secteurs, même s’ils sont très présents dans les récoltes, le tourisme, hôtellerie, remontées mécaniques. Hiver comme été, mer ou montagne, les saisonniers ont pour point commun d’être des travailleurs précaires. Pour les saisonniers locaux, originaires de zones touristiques, faire la saison, ou plutôt les saisons, c’est la condition pour vivre et rester au pays.

Le travail saisonnier recouvre des réalités diverses, pour certains, enchaîner des travaux différents tout au long de l’année (les pluriactifs), pour d’autres, faire une saison permet notamment de financer des études ou d’arrondir la retraite. Pour la majorité, ce sont des allers et retours sans fin entre les cases saisons et les cases chômage.

La durée du contrat saisonnier doit, en principe, être prévue pour une période ne devant pas dépasser huit mois pour conserver un caractère saisonnier. L’activité doit avoir un caractère cyclique, la saison doit avoir une durée limitée, la périodicité et la saison doivent être indépendantes de la volonté de l’employeur.

La grande majorité des saisonniers est payée au Smic. De plus, du fait des interruptions de contrats, les saisonniers ne voient pas leur expérience reconnue, même s’ils gardent le même employeur : vingt saisons d’ancienneté, ce sont vingt saisons au Smic. Les heures supplémentaires sont souvent non ou sous déclarées : ce procédé, s’il arrange les employeurs, met en péril l’accès pour les saisonniers à certains droits, notamment au chômage, à la retraite… On estime à 25 % les travailleurs saisonniers dont les heures supplémentaires ne sont pas payées. Le manque d’inspecteurs du travail dans les zones de forte saisonnalité incite aux abus.

Le logement des saisonniers s’avère être un problème très important, ce qui induit de nombreuses conséquences sur les conditions de vie et de travail des saisonniers. Seulement 8 % des salariés sont logés par les employeurs : le problème prend un aspect primordial été comme hiver. Quelques accords locaux tentent d’améliorer la situation, mais le coût de la vie très élevé dans les zones touristiques et conjugué à la modestie des salaires, fait obstacle à l’accès au logement pour ces salariés.

Accéder à la formation professionnelle pour les saisonniers est souvent difficile en raison de l’alternance des statuts (salariés, demandeurs d’emploi, travailleurs indépendants...). Il existe quelques mesures spécifiques, par exemple dans les secteurs « tourisme social et familial » et « remontées mécaniques et domaines skiables ». Il est parfois possible de bénéficier d’un CDD emploi-formation lorsque le contrat de travail contient une clause de reconduction. La formation peut intervenir à tout moment du contrat et peut également être entamée sur simple promesse de CDD. Des accords de partenariat ont été signés entre les principaux acteurs du financement de la formation professionnelle dans certains départements comme dans les Hautes-Alpes.

Le CPF, Compte Personnel de Formation, donne à tous les salariés la possibilité d’avoir des droits personnels à la formation tout au long de sa carrière professionnelle et ce, quel que soit leur contrat. Les saisonniers doivent donc aussi ouvrir leur droit pour pouvoir accéder à des actions de formation. L’employeur doit donner l’information et aider aux démarches administratives. Mais une infime proportion de travailleurs saisonniers parvient à faire valoir ses droits à la formation

Les propositions de la CGT

La CGT n’est pas favorable à la mise en place d’un statut du travailleur saisonnier. Nous ne voulons pas que les saisonniers soient enfermés dans un contrat précaire, mais bel et bien qu’ils aient les mêmes droits que les autres salariés. La CGT propose un nouveau statut du travail salarié dans lequel les droits sont attachés à la personne : progressifs, cumulables au fil de la carrière et transférables d’un employeur à l’autre.

Pour atteindre cet objectif une première étape doit consister à obtenir :

  • que le contrat à temps plein et à durée indéterminée soit la norme (reconnaissance de la pluriactivité, des compétences et des qualifications, alternance de périodes de formation/emploi/congés, reconduction
  • automatique des contrats…) : garantir le droit à un déroulement de carrière ;
  • le recours au CDD de droit commun dans le cadre strict de la saison (fluctuation d’activité saisonnière), par l’utilisation de la notion d’accroissement temporaire d’activité permettant le versement de la prime de précarité ;
  • que des efforts soient faits sur l’extension de la reconduction automatique des contrats pour tous les saisonniers volontaires, cette dernière étant déjà proposée, par exemple, aux saisonniers des remontées mécaniques ;
  • que la « saisonnalité » soit définie juridiquement d’une façon plus précise avec des motifs strictement limités et identifiés par catégories d’entreprises et non uniquement en référence aux usages d’un secteur ;
  • la défense des conditions de travail des travailleurs migrants ;
  • l’augmentation des moyens donnés à l’Inspection du travail, pour lutter contre le travail non déclaré et le non-respect des droits des travailleurs saisonniers ;
  • la suppression des exonérations sociales et toutes formes de dispositifs d’incitation aux contrats saisonniers ;
  • des droits et des garanties progressifs et transférables d’un contrat à l’autre qui ne doivent pas suivre le rythme des saisons ;
  • une offre plurielle de logements, permettant de répondre à la diversité des attentes et situations des saisonniers (logements réservés à un coût modéré, résidences, logements collectifs, terrains aménagés avec électricité et sanitaires pour accueillir les caravanes, extension de l’accès au 1%, de l’accès au LocaPass…), avec une réelle (ou meilleure) prise en charge par l’employeur et les territoires ;
  • une protection sociale adaptée avec des droits à retraite ;
  • la facilité et le libre accès au développement des compétences professionnelles grâce à une formation
  • diplômante choisie et adaptée ;
  • de développer une GPEC (gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences) territoriale permettant de réintroduire une diversification de l’activité économique ;
  • le droit à la démocratie sociale, aux IRP (délégués de sites, CHSCTE de sites, comités interentreprises) ;
  • avec la CES (Confédération européenne des syndicats), une directive européenne de l’emploi saisonnier garantissant aux salariés détachés par les tours opérateurs étrangers l’application des droits du pays pour lequel ils sont salariés.

Un exemple intéressant, tout n’est pas parfait, mais quelle avancée !

Dans le Jura, un groupement d’employeurs a été créé en agriculture. 79 salariés sont embauchés en CDI (la plupart en temps plein) pour effectuer 150 000 heures de travail en viticulture (60%), en agriculture (25%) et divers autres secteurs (15%). Les salariés n’ont qu’un seul employeur, donc une fiche de paye. Ils ont du travail en permanence, ils ont une convention collective, ils bénéficient d’un Comité d’Entreprise. Tous effectuent des travaux saisonniers, c’est le groupement d’employeurs qui organise les plannings en fonction des saisons. Les employeurs s’y retrouvent avec toujours les mêmes salariés formés et une gestion RH très simplifiée.

Pour information, un guide « saisonniers » est accessible en cliquant sur ce lien : http://tour-de-france-social.cgt.fr/

Témoignage

« Depuis 12 ans, je fais les vendanges pendant trois semaines dans la même exploitation, je perçois le smic. Par contre, mes heures supplémentaires me sont payées en nature avec des bouteilles de vin. Je ne bois pas et donne ainsi mon vin à ma famille. J’aimerais mieux percevoir le montant de mes heures supplémentaires, mais mon employeur me dit que ce n’est pas possible. Je continue à travailler chez ce viticulteur car ce n’est pas loin de chez moi. »

Exemple à suivre

Le FAFIH (Fonds d’Assurance Formation de l’Industrie Hôtelière) a mis en place un dispositif permettant au salarié saisonnier de suivre sa formation entre les périodes travaillées.

Nous contacter

Fédération des Finances CGT
263 rue de Paris - Case 540
93514 Montreuil cedex
Tel : 01 55 82 76 66
contact@cgtfinances.fr
https://www.high-endrolex.com/11