Alerte sur l’avenir du Livret A.

Matignon accepte les injonctions de Bruxelles et prépare, sans complexe, la banalisation de l’épargne populaire, la privatisation et la marchandisation du logement social !

C’est avec une grande surprise que nous avons appris hier, soit 2 jours après le 2ème tour des élections législatives, le contenu de la décision du Premier Ministre François FILLON quant à la décision de la Commission Européenne du 10 mai 2007 enjoignant le gouvernement français d’ouvrir la distribution du Livret A à l’ensemble des banques, et non plus seulement au duopole Banque Postale et Caisses d’Epargne.

En effet, si le communiqué de Matignon, publié le 19 juin, indique qu’un « recours contre certains éléments discutables de la décision de la Commission va être adressé au juge communautaire dans les prochaines semaines », il n’hésite pas à affirmer aussi que « le gouvernement va étudier sans délai la réforme de la distribution du Livret A ».

Pour ce faire, le gouvernement met en place une mission confiée à Michel CAMDESSUS (dont les convictions libérales sont connues) dont les 2 objectifs, non seulement, entérinent de fait les demandes de Bruxelles, mais en plus, vont au-delà en mettant en cause l’ensemble du mécanisme actuel de financement du logement social.

S’il y est, en effet, question de « réformer la distribution du Livret A pour se mettre en conformité avec les règles communautaires » (ce qui signifie en clair, accepter l’injonction communautaire de banaliser la distribution du livret) et il est aussi indiqué que la mission confiée à Michel CAMDESSUS aura aussi pour objectif de « moderniser et améliorer les circuits de financement du logement social » (ce qui signifie, en clair, de remettre en cause le rôle de la Caisse des dépôts joué depuis plus de 100 ans dans le financement du logement social).

Cette décision, qui risque d’aboutir ni plus ni moins la liquidation de l’épargne populaire et à la privatisation du financement du logement social, est scandaleuse et inacceptable.

  • Elle a été communiquée sans aucune concertation avec les acteurs concernés du champ social : syndicats, associations, mouvement HLM... Ainsi par exemple, ni la lettre adressée par l’intersyndicale du secteur semi public financier au Président de la République en mai, ni les demandes d’entretien adressées aux ministères concernées n’ont reçu de réponse !
  • Elle ignore totalement les risques objectifs créés par une banalisation de la distribution du Livret A, pourtant dénoncés depuis des mois par tous les spécialistes du dossier : risque de siphonage des fonds mobilisés sur les livrets les mieux nantis (livret des particuliers ayant atteint le plafond de 15 300 euros ; livrets sans plafond des organismes HLM…) au profit des marchés financiers et au détriment des ressources nécessaires au financement du logement social.
  • Elle renforce la dynamique d’exclusion bancaire des populations les plus précaires et risque d’enfermer la Banque Postale dans une logique unique de « banque des pauvres » sous couvert de compensations illusoires (augmentation éventuelle des commissions versées sur les opérations portant sur des livrets à faibles montants et éventuellement ouverture d’une activité de crédit à la consommation qui aurait pour conséquence immédiate la privatisation de ce service financier public).
  • Elle met directement en cause le système actuel de financement du logement social et notamment le rôle de la Caisse des dépôts qui assure la centralisation « sécurisée » des fonds d’épargne populaire (or en plus de 170 ans d’existence, jamais aucun épargnant n’a été spolié) et les oriente vers des financements sur le long terme d’ouvrages d’intérêt général : ainsi plus de 80 % des logements sociaux ont été financés grâce à ce système dont l’efficacité républicaine repose sur son caractère de service public : pas de sélection des projets en fonction de leur rentabilité potentielle ; possibilité de prêter à très long terme et sans marge …
  • Ainsi sous couvert de modernisation, Matignon prépare en fait la privatisation d’un système de protection de l’épargne populaire et de financement d’intérêt général qui « marche » depuis près de 200 ans sans creuser le déficit public !
  • Pourtant, alors que les besoins sont immenses (plus de 3 millions de mal logés, des centaines de milliers de SDF…) et que le plan Borloo de construction de 500 000 logements sociaux prend manifestement beaucoup de retard, le gouvernement prend le risque d’en obérer définitivement la réalisation. Cette décision s’inscrit pleinement dans le processus de marchandisation et de financiarisation du logement.

Dans ce contexte, nous nous adressons au Président de la République et lui demandons d’indiquer clairement à Bruxelles que le système actuel du livret A dont les deux piliers sont le duopole de distribution par la Poste et les Caisses d’épargne ainsi que sa centralisation sécurisée et son emploi par la Caisse des dépôts à des fins d’intérêt général, constitue un service public inaliénable et échappe aux règles communautaires de libre concurrence édictées par les traités commerciaux européens.

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