La partie de bonneteau du ministre :

Le point de vue de la CGT du groupe Caisse des dépôts :

Réfractaires au progrès social, Bruno Lemaire et ses amis banquiers jouent au bonneteau avec la Caisse des dépôts (CDC), la caisse Nationale de prévoyance (CNP) et la Poste au détriment du service public et des salariés !

Le 30 août, le ministre de l’économie et des Finances, flanqué des dirigeants de la Poste et de la Caisse des dépôts, a annoncé à la presse son intention de transférer à la Caisse des dépôts le contrôle majoritaire du capital du groupe La Poste en « échange » du transfert à la Banque Postale du contrôle de la CNP, filiale historique de la CDC. Présentée sous les allures d’un « pôle public financier » que la CGT revendique depuis longtemps, cette opération purement « capitalistique », si elle se réalise, ne constituera dans les faits qu’un pas de plus vers la banalisation du statut et des missions publiques des trois établissements concernés. Pourquoi ?

  • Sur la forme : il n’est pas inutile de rappeler que la CDC est un Établissement public spécial normalement autonome de l’exécutif et placé à cet effet sous la protection du Parlement. Or cette opération a été validée et présentée par le Ministre en présence de la Présidente de la Commission de surveillance de la Caisse des dépôts, la députée LREM Sophie ERRANTE, étrangement silencieuse ce jour-là alors qu’elle est censée pourtant garantir et défendre cette autonomie. Si les parlementaires ont été tenus à l’écart du processus, il en est de même des représentants du personnel côté Poste comme côté CDC ou CNP, où cette opération n’a fait l’objet que d’une présentation vague et furtive. Pourtant elle concerne l’avenir de plus de 300 000 salariés et fonctionnaires dans les deux groupes.
  • D’un point de vue juridique, la première étape de ce projet consiste en un amendement au projet de loi PACTE qui viendrait modifier l’article 1 de la loi Postale pour permettre à la CDC de se substituer à L’Etat dans le contrôle majoritaire du capital de la Poste, celui-ci gardant néanmoins une minorité de blocage. Or, ce même projet de loi envisage par ailleurs de modifier très sensiblement les règles de gouvernance et de supervision du groupe Caisse des dépôts en accroissant fortement le poids de l’exécutif au détriment du Parlement et en banalisant ses règles prudentielles. En effet, la loi Pacte en confierait directement la définition et le contrôle à l’ACPR à l’instar de n’importe quelle banque privée. Ainsi cette logique aboutira à soumettre tant les missions du service public postal que les missions d’interêt général confiées à la CDC à des critères comptables et financiers totalement banalisés.
  • D’un strict point de vue capitalistique et même si de nombreux points de ce montage restent à éclaircir, on ne peut que relever globalement que cette opération consisterait pour la CDC à perdre le contrôle de sa filiale historique CNP qui lui rapporte chaque année entre un tiers et un quart de son résultat annuel « en échange » d’une pseudo majorité dans le capital du groupe La Poste dont la gouvernance continuerait en réalité d’être pilotée par l’exécutif... le tout en mobilisant près de 7 milliards d’euros de ses fonds propres ! Sans compter sur la grosse incertitude liée à l’éventuelle réaction de l’actionnariat « flottant » du capital de la CNP (25 % de cette entreprise cotée) qui pourrait très bien exiger en justice l’ouverture d’une coûteuse OPA plutôt que de considérer qu’il s’agit d’un simple « reclassement des participations de la CDC » comme le prétend le gouvernement. Enfin, il y a des doutes sur la façon dont les autorités de régulation concurrentielle Interne et européenne interpréteront l’opération envisagée.
  • D’un point de vue économique, ce projet est essentiellement motivé par l’habituelle antienne : pour compenser l’impact de la baisse tendancielle de l’activité postale (7% par an), la Poste doit développer ses activités de « Banque assurance ». L’argument est évident d’un point de vue financier encore qu’on puisse penser que la CDC en « investisseur avisé » attendra de sa participation majoritaire dans la Poste un rendement au moins équivalent à celui qu’elle tirait de la CNP et exercera donc vis-à-vis des activités postales une pression à la productivité accrue. Ainsi il est à craindre que ce projet ait globalement un impact négatif sur les activités et l’emploi au sein du groupe La Poste. Tel que défini, sans réel objectif d’utilité sociale, ce projet risque de surcroît de fragiliser la CNP en transformant son modèle historique de distribution à réseaux multiples et son équilibre d’activité entre assurance individuelle et prévoyance collective. Enfin, loin d’offrir aux deux groupes l’opportunité d’une synergie de missions au service du développement économique et social local, ce montage financier sème la confusion et porte de fortes menaces sur l’avenir des missions et des emplois consacrés à cet objectif au sein de la CDC, déjà « engluée » dans son projet fumeux de « Banque des Territoires ». En fait, il est probable que ce projet serve d’abord le désengagement budgétaire de l’Etat dans les territoires en même temps qu’il encourage les projets aventureux d’investissement du PDG de La Poste à l’international.
  • Sur le plan social, si nous avons déjà évoqué l’impact potentiellement négatif sur l’emploi et les rémunérations de ce montage, il faut également noter qu’il entraînerait en l’état actuel de sa définition une régression du dialogue social. En effet, la CNP sortirait du groupe social Caisse des dépôts tandis que la Poste et la CDC seraient démunies d’une instance sociale de groupe commune.

Loin de constituer un pôle financier public, ce projet n’est en fait qu’une opération de mécano financier dont les effets seront nuisibles tant à l’interêt public qu’à l’emploi. Pour notre part, nous continuons de revendiquer la construction d’un vrai pôle public financier rassemblant dans une logique de complémentarité de missions, la Poste, la CDC, la CNP, BPI France... Cet ensemble devant être placé sous le contrôle démocratique des élus parlementaires et locaux ainsi que des représentants des forces sociales et des salariés plutôt que sous la pression des marchés . Ce serait un vrai changement de logique. Nous ferons valoir nos propositions en ce sens dans le cadre du débat sur la loi PACTE.

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