CSAM du 4 juillet 2025
Face à l’autosatisfaction généralisée de la ministre Amélie de Montchallin que ce soit sur le choix d’ALAN, la politique fiscale, budgétaire et l’égalité entre les femmes et les hommes au sein du ministère.
Face aux interventions de la DGDDI et du secrétariat général en défense de la promotion d’un harceleur condamné , la CGT a décidé de quitter la séance.
Déclaration liminaire de la cgt
Madame la ministre,
Nous ne pouvons commencer notre déclaration sans évoquer le choix (car il s’agit d’un choix) de la start up ALAN comme opérateur de la PSC obligatoire du ministère volet santé.
Nous ne sommes pas, et n’avons jamais été les avocats de la MGEFI, ce que la CGT défend c’est le mutualisme, à l’inverse de ce que vous défendez.
Pour la CGT le choix d’ALAN est scandaleux à plus d’un titre.
La CGT n’a jamais caché qu’elle souhaitait un opérateur mutualiste ; c’est-à-dire appartenant à l’économie sociale et solidaire, non lucratif et dont la gouvernance est démocratique (assemblée générale de ses membres.).
Pourquoi ? Parce que nous voulons un opérateur solide et solidaire dont l’objectif est la couverture santé de ses membres, et non un opérateur dont l’objectif et de se faire du fric.
Nous avons même ces derniers mois cité ALAN, comme pire choix possible ; son modèle, comme startup reposant non sur ses revenus d’activité mais sur la « levée » de fonds spéculatifs.
Ces startups peuvent être déficitaires pendant des décennies, ce qui ne vous pose aucun problème alors que vous, vous exigez des hôpitaux, des crèches, des universités qu’elles soient rentables.
Des fonds spéculatifs pour garantir notre protection en matière de santé, c’est non !
Pour la CGT il s’agit d’un choix politique évident : le président Macron a, sur les réseaux sociaux (linkedin) félicité ALAN pour son développement, le président d’ALAN l’a publiquement remercié pour son soutien.
Le ministre Lombard lui même a déclaré lors de son audition au sénat le 11 juin 2025 qu’il espérait qu’ALAN aura un développement international.
Attention, la CGT ne dit pas que les règles n’ont pas été respectées, mais qu’il s’agit d’un choix idéologique.
Deux exemples :
1. Vous surévaluez constamment le digital, le numérique plutôt que l’humain et le présentiel ; nous le voyons depuis des années dans les services. Peu importe les dizaines de millions dépensés dans des logiciels défaillants, comme GMBI (gestion de mes biens immobiliers) aux Finances publiques ou Arpège à la CPAM, qui plongent les utilisateurs et les usagers dans le chaos, vous avancez coûte que coûte.
C’est pour cela qu’une startup basée sur l’expérience digitale est mieux évaluée pour l’offre présentielle qu’une mutuelle dont on sait, depuis des années, qu’elle propose et assure une présence physique reconnue par les agents.
2. Il s’agit aussi, pour vous, de privilégier, systématiquement, les nouveaux entrants pour affaiblir tout ce qui ressemble encore à un service public enclin à la solidarité. Ainsi Trenitalia bénéficie de ristournes considérables sur le prix des péages entre Paris et Marseille alors que la SNCF paie le prix fort. Contre toute logique une entreprise qui n’a jamais participé à la constitution du réseau l’utilise à prix d’ami pendant que celle qui a participé à sa construction paye plein tarif. Pourquoi ? Pour faciliter, privilégier les nouveaux entrants.
C’est exactement l’argument que le ministère nous a servi quand on lui a demandé comment un nouvel opérateur pouvait mieux maîtriser la sociologie du ministère que l’opérateur historique.
C’est parce qu’il ne faut pas tenir compte des avantages réels et objectif que conférent le fait d’être déjà en place.
Voilà ce que la CGT considère comme un choix idéologique qui ne répond à aucune rationalité.
Enfin, le dernier aspect c’est le mépris des représentants des personnels que nous sommes. Des mois, des années de négociations, de discussions qui ont commencé au niveau Fonction publique ; des accords que la CGT a signés pour en arriver là.
Nous n’avons même pas eu les éléments nous permettant de jouer notre rôle, mais simplement un powerpoint sur table lorsqu’on a dû émettre un avis sur le choix du ministère. Vous persistez à refusez de nous fournir un rapport d’analyse complet qui justifie ce choix.
C’est un véritable bras d’honneur que vous faites aux élus du personnel et nous saurons nous en souvenir.
Pour terminer sur ce point, la pétition qui exige le choix d’un opérateur mutualiste, a aujourd’hui largement dépassée les 12.000 signatures et continue à être signée, en ligne, ou sur papier puisque certains de vos services en bloquent l’accès, la startup nation n’est pas valable pour tout !
Nous vous demandons avec nos collègues de revenir sur ce choix inique.
La CGT étudie bien sûr la possibilité d’ester en justice.
Venons en maintenant aux comptes publics. La CGT a des propositions qui vont à l’inverse des politiques menées depuis des décennies, que vous poursuivez en les aggravant et qui nous ont menées dans la situation où nous sommes aujourd’hui. Non seulement en termes de finances publiques, mais aussi de services publics.
Vous visez à réduire le déficit public à 4,6% du PIB pour 2026, ce qui nécessite de trouver entre 40 et 50 milliards d’euros d’économies. Ces économies devraient principalement provenir de réductions des dépenses publiques, bien que vous insistiez sur l’idée de « dépenser mieux » plutôt que de parler de cure d’austérité.
Les coupes budgétaires affectent particulièrement les services publics et les secteurs sociaux. Pour 2025 nous avions déjà dénoncé une réduction des dépenses de l’État de 2%, incluant une baisse de 32 milliards d’euros des dépenses publiques.
Ces réductions budgétaires ont un impact significatif sur divers secteurs, notamment l’éducation nationale, la recherche et l’aide au développement. Pour la CGT Finances ces coupes remettent en question les investissements nécessaires pour l’avenir et les transitions imposées par l’urgence climatique.
La CGT Finances propose des alternatives à votre politique d’austérité, telles que la lutte contre la fraude et l’évasion fiscale, qui pourraient rapporter jusqu’à 90 milliards d’euros annuels. Elle suggère également de réorienter les aides publiques vers des activités non polluantes et de mettre en place une commission nationale de suivi de ces aides.
De plus, vous devez par exemple mettre en place un impôt sur le revenu véritablement progressif, impôt auquel seraient soumis également les revenus du capital en lieu et place d’un taux forfaitaire à prix d’ami.
Vous devez mettre en place un impôt sur la fortune, (c’est-à-dire sur la chance) digne de ce nom. Alors qu’aujourd’hui 90% du patrimoine est détenu par la moitié des ménages.
Vous devez mettre en place un impôt sur les sociétés, modulé en fonction des politiques menées par les entreprises.
S’il est vrai que les prélèvements obligatoires représentent une plus grande part du PIB en France qu’ailleurs, les cotisations sociales représentent 40% de ces prélèvements obligatoires.
Or, quand les systèmes de protection sociale sont privatisés, les cotisations santé et retraites ne sont plus considérées comme des prélèvements obligatoires et pourtant elles pèsent davantage pour de moins bons résultats.
Faire croire aux travailleurs que sans la sécurité sociale, la retraite et les dépenses de santé leur reviendront moins chères est une imposture !
Pour la CGT Finances, le PLF 2026 ne devra pas intégrer des mesures pouvant dégrader la situation des retraités et des plus vulnérables, tout en protégeant les services publics et en garantissant des conditions de travail décentes.
Nous voudrions enfin aborder deux sujets sur lesquels la CGT note depuis de nombreux mois des problèmes récurrents. Il semble qu’il y ait dans nos ministères économiques et financiers un effacement de la hiérarchie des normes ce qui conduit à une forme de brutalisation du dialogue social.
Nous jugeons que la question de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes est un sujet d’importance dans notre ministère et bien au-delà, une question que la CGT juge primordiale pour améliorer les conditions de travail et donc les conditions de vie de nos collègues, femmes comme hommes. Car, contrairement à ce que pensent certains esprits masculinistes chagrins, l’amélioration de la situation des femmes profite bien à l’ensemble de la communauté.
Cependant, quand on engage des cycles de négociation et/ou de concertation, il serait utile que nos MEF respectent a minima la logique de cette construction du dialogue social. Lorsqu’on prévoit de mettre en œuvre un plan auquel sera adossé un accord négocié, encore faut-il s’assurer d’être sorti du processus de négociation, avant de plonger dans la concertation pour l’élaboration d’un plan. Aujourd’hui nous ne savons pas si l’accord égalité sera validé majoritairement par les fédérations, puisque nos réponses sont attendues à la date limite du 2 septembre prochain. Et si cet accord devait se révéler minoritaire, nous ne savons pas ce qu’il adviendra des mesures inscrites dans celui-ci : reprises en totalité, en partie ou pas du tout au sein du plan égalité ? Oui, nous avons eu des indications orales sur cette question de la part du SG, mais rien d’écrit, donc rien d’officiel.
Nous en profitons pour rappeler que cette idée de saucissonnage de la question de l’égalité entre accord négocié et plan concerté est une décision unilatérale prise à l’entame du processus de négociation en septembre 2023. D’autres ministères ont fait le choix de négocier sur l’ensemble des points ayant trait à l’égalité, ce que nous aurions préféré.
Sans venir en détail sur ce plan, il y a néanmoins un passage que nous voudrions évoquer, puisqu’il est lié de très près à l’échec des négociations égalité qui ont été menées entre septembre 2023 et février 2024 : c’est celui qui concerne l’égalité salariale (Objectif 5 – Tendre vers une égalité salariale).
Cela fait maintenant plusieurs années que la CGT – qui avait validé le 1er plan égalité ministériel en 2011 – refuse d’apposer sa signature sur des plans qui ne nous proposent rien de plus que de réaliser des mesures et des analyses des situations existantes. La CGT réclame que Bercy mette en œuvre un véritable plan ambitieux de résorption des inégalités salariales entre les femmes et les hommes, avec un financement suffisamment conséquent pour permettre d’avancer sur des mesures significatives. La somme mise sur la table à l’ouverture des négociations par Bercy d’un montant de 2 M€ a été jugée insuffisante par toutes les organisations et c’est ce qui nous a conduit à un gros point de blocage en février 2024.
Et nous constatons que c’est à nouveau ce type de mesures qui sont inscrites dans le plan proposé. Pour la CGT, ce n’est pas satisfaisant. Et très loin de l’exigence qui devrait découler de l’obtention du label égalité. Sans oublier que la politique d’égalité F/H a été élevée à 2 reprises par le président de la République au rang de priorité nationale, à chaque fois au début de ses 2 mandats. Mais nous avons bien compris depuis 8 ans que c’était au mieux de l’enfumage, au pire un profond mépris à l’encontre des femmes.
Madame la Ministre, vous nous répondrez que des choses ont été faites depuis 2017. Vous avez raison. Mais est-ce réellement à la hauteur de l’ensemble des violences (pas seulement physiques ou sexuelles donc) que subissent les femmes ? Non, bien évidemment.
Le dernier baromètre #StOpE révélé le 6 mai 2025 est très révélateur à ce sujet. Ce baromètre mesure le sexisme ordinaire dans les entreprises et administrations qui ont signé la charte #StOpE. Et nos MEF font partie des premières administrations qui se sont engagées dans ce dispositif.
Ce sondage géant (plus de 130 000 réponses collectées par Ipsos, dont environ 20 000 au sein de nos MEF) donne des résultats contrastés avec certes des points positifs (meilleur engagement des entreprises/organisations contre le sexisme, amélioration des cadres juridiques et réglementaires, meilleur sentiment de protection contre le harcèlement sexuel, recul plus important du sexisme dans les entreprises/organisations adhérentes de StOpE que dans les celles qui n’en font pas partie…), mais aussi une persistance de points négatifs concernant les inégalités professionnelles, l’égalité salariale, la remise en cause des compétences des femmes à manager ou diriger, les freins dans la carrière liés à la maternité…
Et certains chiffres sont éloquents :
– 70 % des femmes ont été confrontées personnellement à une situation discriminatoire ou sexiste dans leur entreprise/organisation.
– Les 2/3 des femmes ont déjà subi des comportements sexistes en réunion.
– Les 3/4 des femmes sont exposées aux « blagues sexistes », qui ne sont en fait rien d’autre que des propos sexistes sans aucun lien réel avec l’humour et plus de la moitié des femmes ont été confrontées à des remarques sexistes les dénigrant.
– Près de 40 % des femmes ont eu à supporter des remarques sur leur physique ou leur tenue.
– Près de 6 femmes sur 10 sont enfin contraintes de recourir à des stratégies d’évitement pour échapper à ces situations.
Ce que donne à voir ces résultats nous renforce donc dans la nécessité de faire de la lutte contre les VSST un axe majeur des luttes émancipatrices sur l’égalité entre les femmes et les hommes. La CGT l’a maintes fois répété : il ne pourra y avoir d’égalité F/H tant que les violences patriarcales contre les femmes n’auront pas très fortement reculé.
Nous souhaiterions d’ailleurs que les résultats de ce baromètre issus des réponses des collègues de notre ministère puissent être extraits et présentés aux représentants et représentantes élues et à l’ensemble des personnels.
Cela nécessite donc un engagement sans faille de toutes et tous sur cette question des violences et c’est pourquoi la CGT a bataillé durement pour que notre négociation égalité puisse reprendre dès l’automne 2024.
Et qui dit engagement sans faille signifie que dans le même temps où l’on négocie, certaines administrations ne remettent pas en cause par leurs décisions des consensus issus de nos discussions communes entre nos MEF et nos fédérations. Car cela pose un véritable problème de hiérarchie des normes et pourrait nous amener à considérer que nos MEF ne servent plus à grand-chose face aux velléités autonomistes des directions générales d’administration !
C’est ce qui s’est produit dans l’administration des douanes le 18 mars dernier, 5 jours après notre dernière séance de négociation, avec la décision assumée de promouvoir à un cadre d’emploi supérieur (directeur des services douaniers de 2e classe) un individu condamné par la justice pour harcèlement moral 2 ans auparavant et sanctionné par son administration il y a un an et demi. Une situation dans laquelle la victime quant à elle n’a pas obtenu un traitement aussi bienveillant de la part de son administration, la condamnant de fait à un exil par voie de détachement hors de la douane depuis presque 10 ans.
Cette décision constitue également un crachat au visage des victimes (selon les propres mots de la victime). Elle envoie un très mauvais message à l’ensemble de la communauté douanière : même condamné pour des faits de harcèlement, on peut faire une belle carrière. Donc aucune raison de se restreindre pour les harceleurs et toutes les raisons de se taire pour les victimes. En fait, il s’agit d’une intolérable promotion à la culpabilité.
Pour terminer, quelques questions, madame la Ministre. Des questions qui élargissent le débat au-delà de cette seule situation individuelle.
Comment se peut-il, madame la Ministre, qu’une administration de nos MEF, qui a pourtant assisté à l’ensemble du processus de négociation, dans lequel nous avons longuement débattu de la question de la lutte contre les VSS, peut-elle s’affranchir du contenu et des résultats de nos discussions ? A quoi cela sert-il, madame la Ministre, que nos interlocutrices et interlocuteurs du SG nous serinent depuis de longs mois le slogan indiquant : « Protection des victimes et tolérance zéro à l’encontre des auteurs de VSS » pendant qu’une administration vient lui faire perdre tout sens et toute crédibilité ?
Je terminerai enfin par cette question que vous a posé la secrétaire générale de notre syndicat des douanes CGT lors d’une entrevue que vous avez eu avec l’intersyndicale douanière le 28 mars dernier et à laquelle vous n’avez pas souhaité répondre, une question qui avait réellement un caractère global : « Comment expliquer alors que, récemment, un homme condamné définitivement par la justice, condamné en discipline dans son administration, puisse faire l’objet d’une promotion ? » Comme notre secrétaire générale de la CGT douanes, nous sommes impatients de vous entendre, madame la Ministre. Toutes les victimes de VSS aussi.
Pour les VSS, comme pour le choix d’ALAN, il serait temps de tourner le dos à cette attitude de mépris vis-à-vis des victimes, des personnels et de leurs représentantes et représentants.