Loi travail XXL #10 : le comité d’entreprise

Bien maîtriser la vie et le rôle des CE implique de bien connaître leurs origines. Les CE font partie des Institutions Représentatives du Personnel (IRP) nées à la fin du 19è siècle et au cours du 20e siècle. Ils recouvrent des besoins des salariés apparus tout au long de cette période. Ces institutions visent à donner, en même temps que le monde se développe, des droits nouveaux et à assurer la protection du monde du travail. Ce développement ne fut pas un « long fleuve tranquille » et a été parsemé d’embuches et de vicissitudes.

Les IRP, ça été tout d’abord, les délégués mineurs en 1890 (sécurité), puis en 1936 sont apparus les DP pour transmettre les revendications.

La création de chaque organisme de représentation du personnel répond à des besoins exprimés des salariés.

En 1940, c’est la création des comités sociaux d’entreprise (dits « comités patates », 8000 à 9000). Ils sont là pour atténuer les conséquences des pénuries et constituent des outils d’intégration. Ils sont dans la suite des oeuvres sociales patronales.

Les prémices de l’activité économique des CE relèvent du Conseil National de la Résistance. Les réflexions, pour associer les salariés à la gestion, relèvent de cette période de l’histoire.

Même les CE ont conquis des droits. Dans le domaine économique, ça s’est toujours limité à un droit consultatif ne pouvant pas bloquer la décision de l’employeur. Par contre, au travers de l’information, relayée auprès des salariés, ils jouent un rôle important dans les luttes pour la défense de l’emploi. L’ordonnance de 1945 porte création des CE. Ils ne sont alors institués que dans les entreprises industrielles et commerciales de plus de cent salariés et l’ordonnance était fortement teintée de collaboration de classe et largement insuffisante. La réelle naissance des CE date de 1946. « Le comité d’entreprise (L2323-1) a pour objet d’assurer une expression collective des salariés permettant la prise en compte permanente de leurs intérêts dans les décisions relatives à la gestion et à l’évolution économique et financière de l’entreprise, à l’organisation du travail, à la formation professionnelle et aux techniques de production ».

Les CE ont vu leur champ de compétence fortement développé dans le cadre des « lois Auroux » en 1982, c’est de là que datent, en particulier :

  • Le droit à l’expertise (sur les comptes, les licenciements économiques) pour tous les CE ;
  • Le droit d’alerte économique ;
  • L’acquisition de la personnalité civile permettant d’aller en justice quand ses droits sont violés ou qu’il a été porté atteinte à sa personne ;
  • L’indépendance des CHSCT, jusqu’alors commission spéciale du CE ;
  • L’expertise sur les nouvelles technologies ;
  • Le budget de fonctionnement, etc..

D’autres textes sont venus compléter cette nomenclature. C’est le cas, en particulier du droit d’alerte sur la précarité permettant le déclenchement d’une saisine de l’inspecteur du travail dans le cadre d’un usage constaté anormal de la précarité ou du portage salariale, entre deux réunions (L2323-59) [1].

Depuis décembre 1993 en particulier et la première DUP Balladur, puis par les lois Rebsamen, Macron et El Khomri, les droits des IRP et notamment des CE n’ont cessé d’être attaqués, ceci se caractérise par :

  • Le regroupement dans une instance unique (CE, DP), d’abord dans les moins de 200, puis dans les moins de 300 (DP, CE, CHSCT), avec suppression de la réunion séparée pour chaque IRP ;
  • Un encadrement strict des délais d’information et de consultation paralysant l’action du CE ;
  • Dépénalisation de l’entrave, seulement sanctionnée par une amende administrative de 7500 € maximum, etc...

Les activités sociales, sportives et culturelles

Au lendemain de la première guerre mondiale, le patronat créa diverses oeuvres sociales. Elles se voulaient assurer l’autorité patronale dans la sphère familiale. La législation de 1945-1946 marqua une rupture radicale. On passa du paternalisme de l’employeur à la gestion indépendante du CE avec des objectifs différents : de la gestion paternaliste on passait à la prise en charge des activités par les salariés. Les Activités Sportives et Culturelles sont de gestion exclusive du CE. L’intervention patronale est prohibée.

D’ailleurs, les lois Auroux remplacèrent l’expression « oeuvres sociales » par « activités sociales » et consacrèrent cette profonde mutation. La CGT s’en empara pour faire, en sorte, que les CE deviennent des lieux d’épanouissement, d’élévation culturelle et de démocratie.

La CGT propose comme axes revendicatifs

Sur la représentation des salariés au travers, entre autres, des CE :

  • Des institutions représentatives rénovées doivent devenir un droit pour tous les salariés, sans exclusive, y compris ceux des petites entreprises ou en situation de précarité, du public comme du privé. Les missions et attributions spécifiques des délégués du personnel, comités d’entreprise et comités d’hygiène, sécurité et conditions de travail élargies à l’environnement doivent être confortées et étendues.
  • Un droit à une information sociale et économique transparente et lisible : il doit être développé par une information périodique des institutions représentatives du personnel reposant sur des indicateurs clairs et synthétiques, établis selon une logique économique, sociale et environnementale et regroupés dans un document unique, adressé à tous les élus (DP, CE, CHSCTE…). Ils doivent assurer la pleine visibilité de la formation et de la répartition des richesses produites, au sein de l’entreprise étendue, constituée par le groupe, voire par les réseaux de sous-traitance.
  • Droit à une consultation efficace. Les conditions doivent être créées pour une véritable prise en compte des avis des élus dans les procédures d’information-consultation :
    • création d’un droit de recours suspensif de tout licenciement ;
    • extension à tous les CE de la disposition appliquée au comité d’entreprise européen : « Lorsque la direction décide de ne pas suivre l’avis exprimé par le comité, ce dernier est de plein droit réuni de nouveau, s’il en fait la demande, par le dirigeant, pour tenter de parvenir à un accord. » ;
    • rendre obligatoire la consultation préalable du CE sur les points mis à l’ordre du jour du conseil d’administration ou du conseil de surveillance, lorsque celuici porte sur un droit d’information-consultation du CE ou du CHSCTE.

Droits pour les activités sociales, sportives et culturelles

  • Des moyens pour permettre l’accès de toutes et tous à la culture dans sa diversité, aux services, contenus et moyens de communication écrite, orale ou visuelle et à une information pluraliste comme constitutifs d’un développement humain durable.
  • De faire du « droit aux vacances pour tous » un droit au même titre que celui au travail, à la santé, à l’éducation, au logement.
  • Le droit aux pratiques sportives de son choix pour toutes et tous, à tous les âges de la vie.
  • Faire en sorte que tous les CE possèdent un budget et qu’il soit suffisant pour conduire de telles politiques.

Notes

[1Lorsque le comité d’entreprise a connaissance de faits susceptibles de caractériser un recours abusif aux contrats de travail à durée déterminée, aux contrats conclus avec une entreprise de portage salarial et au travail temporaire, ou lorsqu’il constate un accroissement important du nombre de salariés titulaires de contrats de travail à durée déterminée et de contrats de mission, il peut saisir l’inspecteur du travail. Sans préjudice des compétences qu’il détient en vertu des articles L. 8112-1 et suivants et de l’article L. 8113-7, l’inspecteur du travail adresse à l’employeur le rapport de ses constatations. L’employeur communique ce rapport au comité d’entreprise en même temps que sa réponse motivée aux constatations de l’inspecteur du travail. Dans sa réponse, l’employeur précise, en tant que de besoin, les moyens qu’il met en oeuvre dans le cadre d’un plan de résorption de la précarité destiné à limiter le recours à ces formes de contrats de travail. A défaut de comité d’entreprise, les délégués du personnel peuvent exercer les attributions conférées au comité d’entreprise pour l’application du présent article.

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