Loi travail XXL #13 : suppression du CHSCT

Le gouvernement nous a remis les ordonnances réformant le Code du travail. Le contenu de celles-ci n’apporte pas de grande surprise : un recul du droit du travail jamais vu jusqu’alors, accompagné d’un profond mépris des salariés.

Le but est d’affaiblir tout contre-pouvoir indépendant de l’employeur à travers une instance unique qui sera, dans la réalité, recentrée sur l’économique et dont les choix seront opérés compte tenu de l’importance des missions et des sujets à traiter en réunion.

Dans une période où les questions de santé au travail sont les plus prégnantes et dont l’actualité nous rappelle sans cesse le mal être et le mal travail vécus par les salariés, les CHSCT sont démantelés. En supprimant les instances CE, DP et CHSCT d’une manière « forcée », le gouvernent tente dans les faits d’éloigner les militants et leurs organisations du travail et des travailleurs.

Le CHSCT (comité d’hygiène sécurité et conditions de travail) est transformé en commission qui travaillera sous tutelle du CSE, la délégation unique, qui la missionnera ! Le nombre de délégués et leurs moyens sont renvoyés à des sorties de décrets.

La commission dans les entreprises de plus 300 salariés ne pourra se substituer réellement aux CHSCT. Ses prérogatives et missions telles que définies, notamment à l’article L 4612-1 du Code du travail, ne sont pas reprises dans le texte !

Manifestement, la loi travail 1 ne suffit pas et sans qu’aucun bilan ne soit fait sur sa mise en oeuvre partielle, ce gouvernement va encore plus loin et plus vite. La violence technocratique de ces ordonnances s’inscrit en dehors de toute connaissance de la réalité du monde du travail s’appuyant probablement sur des discours alarmiste et mensongers de certains sur l’autel du coût du travail.

Cette attitude est très dangereuse pour notre démocratie et aura des répercussions à court terme sur le collectif et le vivre ensemble. Oui, il y a des intentions non avouées de mettre les travailleurs salariés au pas par la régression sociale, car force est de constater que ces ordonnances « idéologiques » répondent au courant de pensée libéral le plus rétrograde et laissera, à coup sûr, des traces, si elles devaient paraître.

L’expertise CHSCT

L’expertise CHSCT était un des outils du Comité qui pouvait permettre aux salariés et à leurs organisations de construire un rapport de forces à partir de la réalité de leurs conditions, de leur travail. Elle est un outil indépendant de l’employeur qui aide les représentants du personnel à mieux comprendre les enjeux de la santé au travail. Le patronat a toujours vu le droit à l’expertise comme un contre-pouvoir dont le CHSCT bénéficie et sur lequel il n’a pas la main !

À y regarder de plus près, la « dépense » est relative, voire marginale. Il existe 25 000 CHSCT dans ce pays et moins de 1 400 expertises par an sont déclenchées (soit 5 % des CHSCT ou un expertise tous les vingt ans par CHSCT). 80 % des expertises concernent les projets importants et 20 % le risque grave.

L’ordonnance telle qu’elle est écrite , modifie fondamentalement son financement par la participation du CSE (nouvelle instance fusionnant CE, DP et CHSCT) à hauteur de 20 % du coût de l’expertise, ce qui rendra impossible les expertises pour une majorité de CSE.

Rappelons que 62 % des expertises sont effectuées dans les entreprises de moins 500 salariés et 77 % des cabinets réalisent entre 0 et 10 expertises annuelles.

Il est certain qu’une telle évolution fera disparaître un très grand nombre de cabinets d’expertises car elle empêchera les représentants du personnel, faute de budget suffisant ou d’absence de budget lié à la mise à disposition par l’employeur de moyens, de faire appel à un expert extérieur indépendant de l’employeur. Les représentants du personnel devront donc, dans le meilleur des cas, opérer des choix impossibles.

L’autre problème posé est que l’ordonnance prévoit le « basculement » possible d’une partie du budget du fonctionnement du CSE (0,2) vers le budget des activités sociales, et vice-versa. Ce qui aura pour effet une pression quant aux dépenses pour le fonctionnement du CSE, et notamment sur la demande d’éventuelle expertise.

Le patronat ne cesse de considérer le travail comme un coût, mais il estime aussi que les instances représentatives du personnel (DP-CE-CHSCT-DS) sont un frein au toujours plus de productivité et de rentabilité. À défaut de pouvoir les supprimer, il réclame de les regrouper afin de réduire leurs rôles et prérogatives. Le CHSCT est donc transformé en « commission » sous tutelle du CSE, avec des prérogatives très affaiblies. Et un de ses outils qu’était l’expertise CHSCT, une propriété des salariés à travers le CHSCT, devient très difficilement accessible.

L’expertise n’a jamais été pour la CGT une fin en soi, mais un outil de transformation, de construction du rapport de forces, de perspectives revendicatives.

Actuellement : droit à l’expertise CHSCT

L’expertise appartient au CHSCT. Il en a la propriété sur le résultat qui doit en être fait. L’expertise restant à la main du CHSCT, ce n’est ni du conseil, de la médiation ou autre. Les experts de leur travail restent les travailleurs et l’expertise doit être un outil syndical au service du pouvoir d’agir des travailleurs.

La CGT propose

Le CHSCT doit rester une institution et personne morale.

En 1982, le CHS (comité hygiène et sécurité) devient CHSCT (comité d’hygiène, sécurité et conditions de travail). Il s’affranchit du CE dont la préoccupation première est le débat économique pouvant « oublier » les enjeux de conditions de travail.

Il y a également une réelle exigence de renforcer les moyens du CHSCT (temps de délégation, prise de note, locaux…) qui n’ont pas évolué depuis 1982.

Le CHSCT doit devenir encore plus un outil de proximité, à taille humaine :

  • nous demandons l’élection directe des membres du CHSCT ;
  • le réel du travail doit être au centre des débats du CHSCT ;
  • le CHSCT a besoin de mettre en lumière ce qui est invisible dans le travail. Celui qui est le mieux placé pour savoir ce qui s’y passe, c’est le travailleur lui-même. C’est pourquoi, si son droit d’expression, défini par le Code du travail suite aux lois Auroux, était revisité et réactivé, il permettrait au CHSCT de faire de nouveaux progrès. En effet, cette parole libérée serait pour lui une source considérable de connaissances sur le réel du travail pour en améliorer les conditions de son exécution et aller vers un bien-être au travail ;
  • une formation continue mais non une professionnalisation des membres du CHSCT ;
  • droit au CHSCT de tous les salariés (d’après l’enquête Summer, 54 % des salariés seraient couverts par le périmètre d’un CHSCT) ;
  • les entreprises concernées externalisent, sous-traitent de plus en plus leurs mauvaises conditions de travail à des PME et TPE qui n’en n’ont pas. Voilà un obstacle à franchir pour de nouveaux progrès ;
  • la mise en place de CHSCT de sites (industriels ou de services) serait une meilleure représentation collective pour les salariés des TPE et PME ;
  • un maintien de l’agrément d’État pour les cabinets d’expertises ;
  • un financement à 100 % par l’employeur des expertises CHSCT, quel qu’en soit le motif.

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