Le Tribunal reconnaît la responsabilité de l’État dans la mort d’un fonctionnaire de l’État soumis à un management « disqualifiant et toxique »

Une tragédie ajoute à la jurisprudence relative au harcèlement moral une décision de justice qui précise la définition de cette situation.

Le Tribunal administratif de Paris a condamné l’État, le 17 mars 2016, à dédommager la mère d’Alain Mouzon du préjudice résultant du décès de son fils, fonctionnaire en poste à l’Autorité de la concurrence.

Le jugement précise :
« il résulte de l’instruction que M. Mouzon a été exposé à un harcèlement moral qui a entraîné un épuisement professionnel et le développement de troubles anxieux sévères qui ont conduit à son décès » […]
« M. Mouzon a fait l’objet d’agissements constitutifs d’une situation de harcèlement moral sans pouvoir bénéficier dans les délais requis de la protection à laquelle il pouvait prétendre » […]
« L’ensemble des circonstances […] ont provoqué pour M. Mouzon des troubles sévères dans les conditions d’existence ; l’intéressé a également subi un préjudice moral du fait de cette situation. »
« […] l’administration n’a pas, dans les délais requis par la gravité de la situation et la persistance de risques psycho-sociaux, procédé aux actions nécessaires pour faire cesser au plus tôt la situation de harcèlement moral dont était victime M. Mouzon et protéger la santé de cet agent. »

Les conditions de travail mortifères sont ainsi décrites :
[…] suite à l’arrivée d’un nouveau chef du service juridique, les conditions de travail au sein de ce service se sont fortement dégradées ; outre M. Mouzon, deux autres agents ont été placés en congé de maladie pour épuisement professionnel en décembre 2012 et janvier 2013, soit un quart de l’effectif du service.
[…] un rapport de diagnostic psycho-social fait état notamment d’un allongement incessant des horaires de travail, d’une augmentation considérable des corrections demandées par le chef de service, jusqu’à 17 fois pour une même note de deux pages, d’un manque de soutien et d’écoute à l’égard des agents, […] l’ensemble constituant un « management disqualifiant et toxique ».

Jusqu’au bout le mépris des responsables aura été total.

Selon la justice administrative, le calvaire d’Alain Mouzon aura duré plus d’un an, entre la première alerte en 2012 et son décès le 27 mars 2014, survenu après que son chef ait été écarté de son poste.

Le ministre et l’Autorité de la concurrence se sont bornés à « contester la qualification de harcèlement moral, sans apporter d’éléments de fait significatifs de nature à la remettre cause ».

Le supérieur d’Alain Mouzon poursuit sa carrière sous d’autres cieux, aucune remise en cause fondamentale du mode de gouvernance ne semble envisagée à l’Autorité de la concurrence, dont le président se serait porté candidat à une des plus hautes fonctions de l’État.

Textes de loi, référentiel de risques et DUERP-PAP ne servent pas à grand-chose quand ils sont considérés comme torchons de papier. La défense des agents de l’État exposés aux risques psycho-sociaux nécessite plus que jamais une mobilisation des forces vives conjuguées des agents, des syndicats et des acteurs de la prévention.

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